Ces petites morts domestiques
Artiste : Elisabeth Perrault (Montréal, Canada)
Exposition: Du 29 avril au 5 juin 2021
Les serpents font rĂ©guliĂšrement peau neuve, jusquâĂ quatre fois par annĂ©e, afin de croĂźtre et de mieux se protĂ©ger. MĂȘme si le phĂ©nomĂšne semble somme toute banal, il est toujours exaltant de tomber sur la mue dâun serpent. Cette dĂ©pouille translucide et dessĂ©chĂ©e, bien que vide, conserve la forme sinueuse et la verve de sa vie antĂ©rieure et garde lâempreinte des Ă©cailles larges qui tapissent le ventre du serpent et celle des losanges plus petits qui couvrent sa tĂȘte et le reste de son corps. Si ce processus, Ă la fois biologique et symbolique, Ă©voque le caractĂšre inĂ©vitable de la mort, lâĂ©phĂ©mĂšre et le renouveau, il sustente aussi dâimportantes dĂ©marches fĂ©ministes en art textile, parmi lesquelles celle dâEva Hesse, Jana Sterbak et Kiki Smith, pour ne nommer que celles-lĂ .
La pratique profondĂ©ment sensible et poĂ©tique de lâartiste montrĂ©alaise Elisabeth Perrault (nĂ©e en 1996, Ă Joliette) vient poursuivre et enrichir cette tradition. Ă lâimage de la mue chez les serpents, son exposition solo Ces petites morts domestiques transforme la peau en marqueur temporel, dĂ©positaire de mĂ©moire et dâexpĂ©riences. Des bouquets de fleurs sĂ©chĂ©es apparaissent Ă la surface des piĂšces grandeur nature de Perrault (le matelas, le corps allongĂ© et la peau dĂ©charnĂ©e), fleurs quâelle a elle-mĂȘme rĂ©coltĂ©es Ă la campagne pendant lâĂ©tĂ©, puis fait sĂ©cher Ă lâaide dâune presse. Pour lâartiste, le motif floral, de par sa rĂ©pĂ©tition, allude Ă la monotonie et la solitude, des sentiments qui peuvent ĂȘtre si prĂ©gnants quâils plongent le corps dans lâinaction, ce dernier se rĂ©duisant Ă une tapisserie, spectatrice du temps qui passe.
Les serpents et les fleurs symbolisent la nature cyclique de notre monde qui mue, fane, croĂźt et fleurit, guĂ©rit, se renouvelle Ă des moments prĂ©cis, ou encore au rythme des saisons. Pour participer Ă ce mouvement cyclique, Perrault cĂ©lĂšbre son anniversaire en manifestant sa propre transition dans un rituel annuel au cours duquel elle se fabrique une peau quâelle façonne sur son corps, pour ensuite lâabandonner. Lâartiste rĂ©vĂšle ainsi sa nouvelle pelure dâidentitĂ©, une peau neuve formĂ©e Ă lâabri des regards. Mais une question demeure : oĂč ira ce serpent neuf?
â Traduction par DaphnĂ© B.
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Biographie
Elisabeth Perrault est nĂ©e en 1996. Elle vit et travaille Ă MontrĂ©al. Perrault a obtenu son diplĂŽme de lâUniversitĂ© Concordia en 2020 et poursuit actuellement une maĂźtrise en beaux-arts Ă la School of the Art Institute de Chicago. Travaillant surtout lâart textile, Perrault sâexprime Ă travers des installations sculpturales dans lesquelles formes humaines et objets du quotidien (vĂȘtements, accessoires meubles, etc.) font figure dâallĂ©gories surrĂ©alistes. LâannĂ©e derniĂšre, elle a prĂ©sentĂ© une exposition solo Ă lâhĂŽtel Four Seasons (MontrĂ©al) et a participĂ© Ă des expositions collectives Ă la fondation Rad Hourani (MontrĂ©al) et Ă la galerie Jano Lapin (MontrĂ©al). Au terme de son exposition solo avec Projet PangĂ©e, en avril 2021, elle fera partie dâexpositions collectives Ă la Griffin Art Projects (Vancouver), Ă la galerie Monica Reyes (Vancouver) et Ă la galerie Mayten's Project (Toronto).